L’entreprise face aux dérèglements sociétaux : un nouveau rôle ?

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L'entreprise occupe aujourd'hui une place centrale dans notre tissu social. Traditionnellement, l’entreprise a été pensée comme une entité économique : produire des biens ou services, générer des profits, créer de l’emploi. Mais cette vision est aujourd’hui dépassée. Elle n'est plus seulement un lieu de production économique, mais également un espace de socialisation, de construction identitaire et potentiellement un levier d'action sociétale.
Le monde ne sait plus réguler certaines de ses violences :
• Les violences conjugales, féminicides, harcèlement de rue sont des symptômes d’un dérèglement structurel.
• L’affaiblissement des institutions (famille, école, justice) et la défiance vis-à-vis de l'État accentuent ce sentiment d’"injustice permanente".
➡️ Dans ce contexte, l’entreprise devient un espace de stabilité relative, parfois l’un des derniers lieux structurants pour les individus.

🧭  Rôle sociétal : Jusqu’où aller ? Quelles limites ?
✅ Ce que l’entreprise peut légitimement faire :
• Prévenir les violences (harcèlement, sexisme, agressions) dans son propre périmètre.
• Accompagner ses salarié·e·s victimes (via des référent·e·s, partenariats avec des associations, cellules d’écoute).
• Former à la responsabilité sociale, à la mixité, à l’égalité, au vivre-ensemble.
• Porter des valeurs et les traduire dans ses pratiques RH, managériales et commerciales.


❌ Ce que l’entreprise ne peut pas faire seule :
• Se substituer aux politiques publiques, ni aux missions régaliennes.
• Réguler à elle seule des violences systémiques ancrées dans la culture, le droit, ou les représentations sociales.
Elle peut agir localement, mais ne peut porter seule le poids d’un changement de société sans coordination avec l'État, la société civile, et les autres corps intermédiaires.



🛠️  L’entreprise en a-t-elle les moyens ?
Techniques :
• Oui, si elle mobilise les outils RH : audit social, baromètre de climat, dispositifs d’alerte, formation managériale.
• La technologie (ex. plateformes d’écoute, IA pour détecter les signaux faibles) peut renforcer la vigilance.
Humains :
• Oui, si elle investit dans des fonctions transverses : RH, RSE, QVT, prévention des risques psychosociaux.
• Mais cela suppose un changement culturel profond du leadership : moins de gestion court-termiste, plus de responsabilité collective.
Financiers :
• Inégalement. Les grands groupes peuvent structurer des dispositifs solides.
• Les PME/TPE sont souvent démunies : manque de ressources, surcharge, isolement du dirigeant.
👉 Une mutualisation (par filières, branches, territoires) ou l’appui des pouvoirs publics/associations est indispensable.

💬 Ce que cela implique pour les dirigeants aujourd’hui
• Changer de posture : du "chef" au "gardien de la santé sociale de son organisation".
• Passer du discours RSE à l’action concrète : tolérance zéro sur le sexisme, politiques inclusives, congés spécifiques pour victimes, etc.
• Faire de l’entreprise un levier d’éducation et d’exemplarité.


🌍 En résumé
L’entreprise n’a ni vocation, ni pouvoir à se substituer à l’État face aux violences sociales systémiques, mais elle a une responsabilité croissante dans un monde désorienté.

Elle peut devenir un acteur stabilisateur, réparateur, voire transformateur, à condition :
• D’en avoir la volonté stratégique,
• D’être soutenue par un écosystème (État, partenaires sociaux, société civile),
• De mobiliser ses ressources humaines, techniques, culturelles… et un vrai courage moral.

Une entreprise socialement responsable doit trouver un équilibre entre :
• Agir dans son périmètre d'influence direct
• Reconnaître ses limites et la nécessaire complémentarité avec l'action publique
• Collaborer avec les acteurs spécialisés plutôt que de se substituer à eux