19 mai : un joyeux vacarme parcourt les rues. Il salue à sa manière le déconfinement tant attendu. Cependant, au-delà de cette image imposée à grand renfort de médias, des questions demeurent. Certes, le retour progressif à la vie est une excellente nouvelle. Mais c’est aussi oublier un peu vite que cette renaissance reste très fragile.
Le récit collectif actuel nous fait la promesse d’une relance économique certaine et vigoureuse pour tous. Alors que l’on fait grand cas de la santé physique et mentale des salariés, celle des dirigeants semble être un sujet tabou en France. A peine quelques articles dans la presse. Seraient-ils donc des surhommes ? Le nombre de dirigeants gagnés par l’épuisement professionnel a été multiplié par 4 depuis le 1er confinement. 27% d’entre eux ont pensé au suicide pour des raisons économiques en 2020.
1 chef d’entreprise se suicide en moyenne tous les 2 jours.
Voici quelques bonnes pratiques tirées de l’expérience de dirigeants de pme que j’accompagne depuis 14 mois en tant que DRH. Leur point commun : ils ont su traverser mieux que les autres cette période compliquée. Eprouvés certes ; mais toujours debout. Alors quel est leur secret ?
- Ils ont su se protéger :
- face à l’ampleur du phénomène, ils ont décidé qu’ils ne seraient plus des super-héros. Souvent aidés par un entourage bienveillant ou vigilant, ils ont su déconstruire le mythe du demi dieu seul face à tout. Rares sont les entreprises créées et menée par un seul homme. L'entrepreneuriat est finalement une activité d’équipe. Ce qui est nécessaire c'est l'émergence d'un leader capable de fédérer autour de lui les compétences et les acteurs.
Ils ont (re)découvert la force de l’humilité et de l’humanité.
- ils se sont accordés plus de temps pour eux-mêmes. Suivant en cela le conseil de Philippe VARIN à son comité de direction, lorsqu’il était chez PEUGEOT.
« Mesdames, Messieurs, si vous ne prenez pas 20 mn pour vous par jour, c’est une faute professionnelle ».
Pour certains, ils ont choisi de mobiliser le dispositif APESA qui a pour but de venir en aide aux chefs d’entreprise en situation de souffrance psychologique. C’est un soutien gratuit.
- Ils ont changé d’approche:
- conscients qu’ils ne peuvent pas tout porter, ils ont essayé le lâcher-prise et accepté de faire un peu plus confiance à leurs salariés. Ils ont compris que leurs collaborateurs peuvent être leur premiers soutiens et aussi que toute initiative individuelle a le potentiel de faire une différence immédiate et perceptible. En manageant par la confiance et adoptant une gouvernance plus partagée, des dirigeants ont facilité une forte croissance (Groupon, Bébé au naturel), quand d’autres ont sauvé l’entreprise (Chronoflex).
Je me souviens de la transition d’une cidrerie normande. J’ai été appelé pour aider un dirigeant à transmettre son entreprise à ses salariés. Je leur ai proposé de bâtir un projet à partir de la méthode appréciative (article sur ce sujet ici : https://proximrh.com/blog/109-comment-relancer-l-activite-en-sortie-de-crise). Aujourd’hui, cette cidrerie poursuit son activité, malgré la crise sanitaire.
Une autre voie consiste à mettre en œuvre une démarche RSE en mobilisant les salariés de différentes façons : sensibilisation d’abord ; mobilisation de l’intelligence collective ensuite. Il existe un écart moyen de 13% de performance entre les entreprises qui introduisent des pratiques de RSE et celles qui ne le font pas. Cet écart atteint 20% pour celles qui mettent en œuvre la RSE au niveau de leur gestion des ressources humaines. La RSE offre de nombreuses opportunités dans la maîtrise des dépenses, dans l’émergence de produits/services innovants qui répondent aux besoins du marché. Comme Bonbec show qui va prochainement mettre sur le marché une nouvelle sorte de chamallows, ou CSP Paris Fashion Group (collants Le BOURGET et WELL), qui travaille actuellement sur l’élaboration de produits à partir de polyester transformé (PET) issu de bouteilles en plastiques.
Courageux, tenaces et résilients, les dirigeants d’entreprise restent des êtres humains. Eux aussi ont été touchés par la crise sanitaire physiquement et psychologiquement. Pour y faire face, ils ont mis en œuvre des stratégies de survie pertinentes. Mais au-delà de ces démarches individuelles ou collectives, quelque chose semble avoir bougé dans la gouvernance de ces pme. Le mythe du héros semble laisser la place à un personnage plus pertinent par temps d’incertitude : le stratège. Je voulais leur rendre hommage.
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