Quand il faut se résoudre à licencier, quel est le rôle du DRH ?

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Les chroniques ordinaires de la vie d’un DRH de pme 4/4

On ne va pas se mentir : depuis quelques semaines, on assiste à une accélération des plans sociaux.

Que se passe-t-il lorsque le dirigeant d’une PME se trouve confronté à cette situation où il n’a plus le choix : il doit se séparer d’une ou plusieurs personnes ? Comment « choisir » celui/celle/ceux qui vont devoir partir ?

Je veux dénoncer immédiatement quelques idées reçues. Aucun responsable d’entreprise ne licencie par plaisir, sauf de rares exceptions du type pervers narcissique ou sociopathe patenté.

Un dirigeant de PME déteste se séparer de quelqu’un de son équipe. Il vit cela comme une vraie souffrance. Celle-ci peut affecter son jugement et sa décision. C’est alors que l’aide du DRH/RRH s’avère précieuse.

Quel est le rôle du DRH dans ce processus de séparation ?

Avant tout, il doit faire preuve de bon sens et d’empathie. Par ailleurs, dans une situation de crise, il est garant du respect :

1/ des procédures et règles de droit applicables à la situation.

Même s’il doit parfois subir la pression maladroite d’un dirigeant déboussolé pour orienter les choix : « Dugenou, rappelez-vous qui vous paie ! », un licenciement économique obéit à des règles de procédure précises, édictées soit par le Code du Travail, soit par la convention collective applicable à l’entreprise.

Oui, il y a un « ordre des licenciements ». Vous le saviez ?

Légalement, « En l'absence de critères fixés par la convention ou l'accord collectif, l'employeur est chargé de les définir, après consultation du comité social et économique (CSE). Il doit alors obligatoirement tenir compte de tous les éléments suivants :

  • charges de famille du salarié, en particulier celles des parents isolés
  • ancienneté du salarié dans l'établissement ou l'entreprise
  • toute situation rendant la réinsertion professionnelle spécialement difficile, en particulier celle des salariés âgés ou handicapés
  • qualités professionnelles appréciées par catégorie (rapidité et polyvalence dans la réalisation des tâches)
  • d'autres critères peuvent être ajoutés à cette liste. »

2/ De la préservation des intérêts de l’entreprise.

Le DRH doit savoir faire la synthèse entre l’économiquement soutenable et le socialement responsable. Il faut alors qu’il trouve la meilleure solution pour chacun, sans se laisser influencer par l’affect, notamment dans la mise en œuvre du plan de reclassement. Il n’est pas seul, mais il pilote la procédure et en assume donc la responsabilité. A force de travail et souvent d’expérience gagnée après des années de métier, des « miracles » peuvent se produire. Ainsi, d’un plan de licenciement initial de plus de 100 personnes pour une entreprise industrielle, le DRH parvient à moins de 9 licenciements dits secs. Il a évité le pire des cauchemars à de nombreuses familles, tout en préservant l’image de l’entreprise et l’honneur du dirigeant (cas vécu en 2008 pour une société eurélienne de fabrication de contenants en plastique à destination d’un laboratoire pharmaceutique américain que j’ai accompagnée).

3/ d’une communication simple et authentique.

  • avec les représentants du personnel /ou avec le Comité Social et Economique, lorsqu’il existe, d’abord : lors des réunions de concertation, le DRH doit présenter aux côtés du dirigeant la situation économique difficile que traverse l’entreprise. Non pas sur des impressions, mais sur des faits. Ne jamais oublier que les représentants du personnel peuvent avoir recours à un expert – payé par l’employeur- qui peut contester l’analyse présentée. Un DRH doit également être conscient qu’il ne peut rien à lui tout seul. Il a besoin « d’alliés » surtout dans un moment aussi critique. Les représentants du personnel sont des relais de communication importants auprès des salariés. Il est donc primordial de savoir gérer les relations avec ces derniers dans ce temps particulier.
  • Avec les salariés concernés, ensuite : lorsque la vie économique et sociale d’une personne est en jeu, le DRH n’a pas le droit de tricher avec la vérité. Même s’il ne peut pas tout dire, il doit mettre en place un accompagnement empreint d’empathie et de respect. C’est ce qu’on appelle « l’offboarding ». Un vrai DRH n’oublie jamais que cette personne/ces personnes ont permis de développer l’entreprise à un certain moment de son histoire. Cette contribution mérite d’être reconnue.

Tous les dirigeants ne cherchent pas à se débarrasser arbitrairement des personnes qui le « gênent ». Ce n’est pas le règne de l’arbitraire absolu. Son pouvoir et son action sont strictement encadrés par un ensemble de règles contraignantes. Leur non-respect donne lieu à l’allocation de dommages et intérêts élevés au profit du salarié victime d’une décision arbitraire.

Dans une juridicisation croissante de la relation de travail, une création récente de la jurisprudence devrait inciter le dirigeant à la prudence à la réflexion avant tout action inconsidérée : le préjudice d’anxiété. C’est le terme utilisé pour nommer une situation d'inquiétude permanente crée par un évènement susceptible d’affecter « la santé mentale » d’un individu.

Ainsi, lorsqu’un PDG de PME n’a plus d’autre choix que de se séparer d’un ou de plusieurs collaborateurs, il ne peut le faire sans respecter un certain nombre de lois et/ou procédures. C’est dans ce cadre légal que le DRH/RRH a un rôle à jouer, en assurant parallèlement son rôle de médiateur et, autant que faire se peut, en trouvant des solutions qui préservent au maximum les employés et la santé de l’entreprise